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Un cauchemar

Une plaquette somptueuse, modestement intitulée Le Bassin d’Arcachon, aéroport intercontinental, décrit par le menu, le cauchemar qu'aurait pu devenir ce site extraordinaire.
Elle a été éditée par la maison J. Bière de Bordeaux sans doute aux alentours de 1938 (à + ou – un an).
Elle présente un des avenirs possibles du bassin, comme en ont rêvé tant d'hommes depuis le milieu du XIXe siècle, qui y ont vu un port de guerre, un port de commerce. Cette fois c'est grave, c'est un aéroport.

Le contexte est celui des vols commerciaux intercontinentaux de l'entre deux guerres; il paraît acquis que ces vols vont s'effectuer à partir de gros hydravions qui sont les seules machines capables de proposer une solution en cas de panne moteur (alors fréquente) au-dessus d’un océan.
Ces appareils vont exiger un plan d’eau adéquat contigu à un aéroport classique.
Les passagers en provenance du nouveau monde commenceront leur voyage en hydravion. Dès l’amerrissage de celui-ci, ils seront transférés à l’aérodrome voisin où des avions traditionnels les dispatcheront sur toutes les capitales européennes.
C’est dans ce cadre qu’après avoir hésité, le ministre de l’Air donne son aval à la création par Latécoère de l’hydrobase des Hourtiquets, sur le lac de Biscarrosse.
La construction de cette base débute en 1938, et c’est très certainement au même moment que la plaquette qui nous occupe est publiée.
Cette plaquette commence par s’attaquer à tous les projets locaux dont il avait été question et en premier lieu à la base de Biscarrosse qui décidément ne présente que des inconvénients.
Après quoi sont passées en revue celle dite de Grattequina près de Bordeaux mais qui serait trop éloignée de l’aérodrome de Mérignac. Celle du Verdon qui a fait moins de bruit mais qui coûterait trop cher.

Finalement une seule solution s’impose, celle qui ferait du Teich le premier aéroport intercontinental commercial.
Voici donc la présentation de ce cauchemar

d'après Jean-Pierre Ardoin saint Amand

Plaquette

La base du Teich

La base que nous avons envisagée au Teich (Bassin d’Arcachon) présente les avantages suivants :
Elle est située dans une anse tranquille, à 8 kilomètres d'Arcachon, au centre des plages qui bordent le Bassin, reliée à Bordeaux par 40 kilomètres de route rapide et à Arcachon par la route corniche prévue dans le projet ALFRED-DUPRAT, évitant les trois passages à niveau de la route actuelle, et, partant, les dépenses nécessitées par leur suppression.
Cette route permettrait de récupérer et de valoriser de vastes terrains insalubres, qui se trouveraient remblayés par le dragage des sables d'affouillement du plan d'eau.
En outre, la voie projetée constituerait une liaison commerciale et touristique entre les divers ports de la côte.Cliquez pour agrandir
Plus pittoresque que la voie en service, elle ajoutera à la satisfaction du touriste et sera plus commode et plus rapide pour les usagers.
Mais son importance deviendra capitale pour la marine de commerce, parce qu'elle permettra la création d'un port de pêche, qui, au point de vue stratégique, peut offrir un abri aux unités légères de nos escadres.
De même que les sables dragués seront utilisés pour la constitution de la route en corniche, ils serviront à établir l'aire de l'aérodrome, dont la création correspond au plan d'infrastructure – aérodrome situé à mi-chemin de Cazeaux et de Mérignac – tout comme le plan d'eau du Teich peut constituer un plan de secours pour la base d'Hourtin.
Cet aérodrome sera d'ailleurs un élément de développement pour les stations balnéaires environnant le « Bassin ».
La base aéronautique du Teich présente également un très grand intérêt, car il est possible, aux appareils en difficulté sur l'Océan de regagner le port ou d'y être ramené en remorque.
Le Bassin n'est pas agité par les courants violents, ni par le mascaret – et le brouillard y est moins fréquent et moins dense.
Tels sont les avantages techniques de la base que nous préconisons. Dans l'ordre pratique, nous avons indiqué que le plan d'eau existe ; il suffit de l'approfondir – mais le gros matériel nécessaire au dragage pourra être amené à pied d'œuvre, tout monté.
La dépense engagée est inférieure à celle qui a été prévue pour la réalisation des autres projets, et, dans tous les cas, elle sera largement compensée par la revalorisation de 600 hectares de terrain, jusqu'ici incultes et insalubres.

Vue d'ensemble

Cliquez pour agrandirTout indiqué par sa position géographique, à l'abri du promontoire arcachonnais, dans une baie verdoyante, l'aéroport intercontinental comprendra une hydrobase et un aérodrome réunis par une gare commune, desservis par une route autostrade et la voie ferrée.
L'ensemble forme ainsi un tout, tant au point de vue de la construction, qu'au point de vue de l'exploitation.

Le plan d'eau. – Un des plus vastes plans dont dispose notre pays permet l'amerrissage et le départ des hydravions les plus lourds, les plus volumineux et les plus rapides, ceci quelle que soit la direction du vent.
D'un établissement facile et sans inconvénient pour les ostréiculteurs, qui ne peuvent cultiver les huîtres à cet endroit où la Leyre déverse son eau douce. Par contre, cette eau douce convient aux coques métalliques des aérobus.
Il sera balisé par des bouées lumineuses reliées par un filet qui empêchera les incursions de barques ou d'épaves dangereuses.
Des slips et des grues serviront à mettre ou à retirer de l'eau les appareils.

L'aérodrome. – La solution adoptée, en forme de triangle présente, sur ses limites extérieures,Cliquez pour agrandir le bassin, la route et la rivière – Croisé de pistes en direction de tous les vents, sa plateforme sera établie au-dessus du niveau des plus fortes marées.
Le remblai provenant du dragage des fonds sablonneux, perméables, frais et fertiles se prêtera parfaitement à la germination de graines de gazon sur lequel se poseront mollement les avions.

L'Aérogare – Edifiée en dehors des différentes pistes de décollage, ce bâtiment s'étend entre l'autostrade et l'aérodrome.
Il constitue un vaste édifice de trois étages comportant l'organisation la plus perfectionnée de météorologie et les différents services administratifs ; un somptueux hôtel assorti d'un restaurant réaliseront le confort le plus moderne et des terrasses, orientées idéalement vers le N.-E., seront à la disposition des voyageurs et du public.
De vastes hangars placés sur les quais, également disposés sans porter de gêne à la navigation aérienne, contiendront des ateliers, des garages et tout ce qu'exige la technique des transports, de l'aéronautique terrestre et navale.

La voie ferrée permettra le transport rapide des voyageurs et du matériel.

La route enfin viendra compléter ce projet. Elle placera l'aérobase à la porte de la capitale du Sud-Ouest. Topographiquement, elle guidera les pilotes, tout comme le Bassin sera un repère pour ¬les transatlantiques aériens.
C'est en somme, et sous ce dernier rapport, un prolongement imprévu par eux, de l'œuvre de Chambrelent et de Brémontier, et un fleuron de plus à la couronne de la Côte d'Argent.

Carte

21/09/08