Legallais - Le Nouveau Grand Hôtel (1910)

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En 1910, enfin, le Grand Hôtel est restauré et réinauguré; mais il ne retrouvera jamais sa splendeur d'antan. Il sera hopital complémentaire pendant la guerre de 1914-1918. Il est aujourd'hui divisé en appartements.
Datation : le cachet dit 1923, la carte, liée à un évènement, dit très précisément 1910. Il s'agit en effet de la carte publicitaire éditée par Neveu à l'occasion de la réinauguration du Grand Hôtel.
L'avenir d'Arcachon a suivi de près la reconstruction de l'hôtel

 

(Avenir d'Arcachon N° 2901, 2902, 2903, 2904, 2906 et 2914 de l'année 1908)

Le Grand-Hôtel d'Arcachon, construit en 1866 au coin du boulevard de la Plage et de la rue du Casino, sous les ordres de M. Léon Lesca, était un établissement quadrangulaire de proportions grandioses. On y accédait par un escalier monumental. Le rez-de-chaussée comprenait un hall mesurant 22 mètres sur 10, 8 mètres de haut ; à droite, un salon-restaurant d'été dans une galerie vitrée donnant sur la mer mesurant 12 mètres sur 24 ; à gauche un salon des dames et de lecture long de plus de 20 mètres ; deux appartements avec chambres, salon et vestibule ; un jardin à l'ouest avec lawn-tennis et garage ; au nord, une vaste terrasse avançant sur le Bassin et où souvent s'est tenu le jury des régates.
Cet hôtel, un des plus beaux du Sud-Ouest, comprenait 300 chambres desservies par un ascenseur et éclairées à l'électricité.
Il fut successivement dirigé par M. Van Hymbeeck, directeur du Grand-Hôtel à Paris, puis par M. Lubcke et enfin par M. Ferras.
Nous voudrions énumérer ici les étrangers de distinction qui y descendirent.
(….)
Dans la nuit du jeudi au vendredi 21 septembre, le feu s'est déclaré au Grand-Hôtel et l'a complètement détruit. vers 2 heures du matin, le feu se déclarait dans une pièce inoccupée, aile de l'Est, au premier étage. L'eau et le sevice d'incendie de la Ville fit défaut. Tous les voyageurs furent sauvés. A 4 heures du matin, tout le Grand-Hôtel n'était plus qu'un amas de décombres.
Il avait duré 40 ans (voir l'avenir d'Arcachon numéro du 23 septembre 1906 *)
On lisait dernièrement dans le journal de M. Veyrier-Montagnères qu'un projet de reconstruction du Grand-Hôtel est étudié par la Société de construction des Grands Hôtels Européens qui serait chargée de cet important travail.
Le nouvel établissement, édifié et aménagé à la moderne, serait exploité par M. J…, propriétaire de deux hôtels, l'un à Biarritz, l'autre à Saint-Sébastien. (...)

Après avoir fait l'historique du Grand-Hôtel depuis 1866, année de sa fondation, il est tout naturel d'exposer la situation présente, et, pour assurer son avenir, auquel la prospérité même d'Arcachon est étroitement attachée, de parler de la Société du Grand-Hôtel d'Arcachon.
Le Propriétaire du Grand-Hôtel d'Arcachon (qui a été incendié en septembre 1906), consent à apporter le terrain d'une superficie de 6.000 mètres environ et les constructions qui subsistent, moyennant 250.000 francs, payables moitié en actions entièrement libérées et moitié en obligations, donnant ainsi une preuve de sa confiance dans l'avenir d'Arcachon et dans la prospérité de l'hôtel, qui doit s'élever au lieu et place de celui qui a été détruit par l'incendie.
Ce prix de 250.000 franc est très avantageux, si on considère que la future société sera propriétaire, non seulement du terrain estimé à 50 fr. le mètre, mais encore des grilles, murs et terrasses ayant une valeur d'autant plus appréciable qu'ils auront encore, en grande partie, leur utilisation dans le nouvel hôtel.
Cet hôtel, qu'on se propose de construire, sera de premier ordre avec tout le confort moderne et comprendra environ 120 chambres de maîtres et de courriers, une magnifique terrasse sur le Bassin.
Comme nous l'avons dit, le Directeur en sera M. Journeau, propriétaire de l'Hôtel du Palais à Saint-Sébastien et Directeur de l'Hôtel Régina à Biarritz.
Nous ne nous étendrons pas sur le projet financier : capital actions 600.000 francs, capital obligations 600.000 francs, qui auront l'emploi suivant : actions d'apport entièrement libérées et obligations remises au propriétaire de l'Hôtel : 250.000 francs ; travaux de construction et aménagement 900.000 francs ; frais de constitution de Société et imprévus 50.000 francs ; total égal : Un million deux cent mille francs.
Le Directeur locataire assure un mobilier de 300.000 francs, moyennant un bail de 30 ans, avec loyer gradué de 30.000 à 65.000 francs.
D'après les prévisions de l'architecte, les travaux commenceront en septembre 1908 pour être terminés le 15 juillet 1909.
Tel est, en ce qui peut intéresser le public, le résumé des Statuts de la Société du Grand-Hôtel d'Arcachon.
La notice en a paru au bulletin annexe du Journal Officiel du 3 août 1908, conformément à l'art. 3 de la Loi de finances du 3 janvier 1907, et statuts déposés chez Me Motelay, notaire à Bordeaux, le 31 juillet 1908. Ils sont signés H. Martinet, 129, rue du Faubourg Saint-Honoré, Paris.

(…)
Les habitants du quartier central arcachonnais, du boulevard de la Plage, de la rue du Casino, ont fait des réunions et des pétitions nombreuses pour qu'en prévision de la reconstruction du Grand-Hôtel une place fut ouverte dans ses abords ; de belles promesses leur ont même été données.
Heureusement qu'il existe dans notre pays des intelligences éclairées, des cœurs dévoués et généreux, des influences puissantes, des activités alertes et précieuses qui se sont fait un devoir de réparer les ruines d'un moment, de restaurer les anciennes magnificences, de faire appel au patriotisme local, de relever les courages, et de prendre hautement en main la sauvegarde des intérêts généraux et de la fortune publique. Nous les en remercions au nom de la cité d'Arcachon.
Pour que notre ville reprenne un nouvel essor, pour qu'elle retrouve une prospérité que lui a ravi un cas fortuit, il importe que tous et chacun mette la main à l'œuvre, et contribue largement, sans hésitation comme sans reculade, par un concours financier, effectif, universel, à la reconstruction si impatiemment attendue.
Assez longtemps une cruelle expérience a démontré aux propriétaires fonciers qui ne veulent pas voir diminuer la valeur immobilière de leurs villas, pas plus que leurs locations faiblir ; à tous les corps de métiers dont les travaux, et partant les bénéfices, s'étaient tout-à-coup réduits ; qu'Arcachon ne pouvait se passer du Grand-Hôtel.
Cet établissement unique en son genre, aussi bien que le Palais Mauresque son vis-à-vis naturel, ne constituent-ils pas, pour les vieux arcachonnais, le double fleuron de nos gloires passées, de notre esthétique urbaine, et de nos richesses artistiques et citadines.
C'est donc joyeux et consolés que nous avons appris la constitution de la Société du Grand-Hôtel qui procède actuellement à l'émission de ses actions représentant un capital de 600.000 fr. divisé en 1.200 actions de 500 fr. sur lesquelles le premier quart seulement, soit 125 francs, est exigible en souscrivant.
Le succès de cette émission est d'ores et déjà assuré. Outre que cette affaire se présente dans des conditions d'honorabilité et de sécurité absolues, sous des patronages tellement accrédités qu'aucune émission financière ne saurait être plus sérieuse, ni étayée par de plus sûres garanties ; l'accueil spontané et enthousiaste fait à son premier appel, la rapide constitution des plus gros chiffres de son capital, assurent la réussite certaine et la prochaine réalisation du but poursuivi.
On peut d'ailleurs constater qu'en dehors des puissantes souscriptions qui assurent le triomphe de la mise en marché de la Société du Grand-Hôtel, les promoteurs ont eu l'ingénieuse idée d'inviter le commerce local à s'intéresser à la prospérité du futur grand établissement.
Les propriétaires comme les négociants l'ont compris, et dans un élan commun, répondent avec empressement aux propositions qui leurs sont faites, et souscrivent dans la mesure de leurs moyens aux actions de la Société.
C'est un bon exemple de solidarité industrielle et locale, qui non seulement affirme ces heureux débuts mais permet d'envisager l'avenir avec confiance et certitude.
Nous ne savons si un délai est imparti à cette émission, mais à en juger par les résultats déjà obtenus, celle-ci ne tardera pas à être close ; on entrera alors dans la deuxième phase ou établissement de la construction.
Nous tiendrons nos lecteurs au courant des projets de plans et devis.


E. G.


Comme nous tenons à insérer tout ce qui intéresse le Grand-Hôtel, nous reproduisons ci-dessous l'article de notre confrère Arcachon-Journal :

La population commençait à être inquiète au sujet de la reconstruction du Grand-Hôtel. Les soi-disant bien renseignés prétendaient qu'au 1er octobre on verrait une équipe d'ouvriers travaillant avec ardeur à la démolition des ruines existant, mais comme sœur Anne, on a rien vu venir. Allons, pensait-on, le sort en est jeté : Arcachon restera sans Grand-Hôtel.
Eh bien, non ! Arcachon aura son Grand-Hôtel, car une Société anonyme vient de se créer et l'homme qui s'est mis résolument à la tête du mouvement est trop actif, trop intelligent et trop résolu pour ne pas arriver au but qu'il poursuit, brisant même les obstacles que l'on pourrait semer sur sa route.
Nous devons ajouter qu'il est puissamment secondé par des personnalités qui, spontanément, lui ont promis leur concours pécuniaire, montrant ainsi, dans un élan commun, leur désir de voir prospérer notre chère cité.
Mais que ceux qui nous lisent ne croient par que le maire d'Arcachon, celui qui devrait cependant être le premier à encourager une telle entreprise, fasse partie de la combinaison. Non : si nous devons nous en rapporter à divers renseignements qui nous sont parvenus, il aurait tout simplement cherché à entraver l'affaire. D'ailleurs nous aurons probablement l'occasion de nous expliquer plus clairement. Constatons simplement que son objectif est toujours et quand même Moulleau, ce qui n'étonnera personne.
Il est donc du devoir de tous de favoriser l'émission lancée, en souscrivant les parts que leur situation financière permet. On ne doit pas rester indifférent en présence d'une entreprise qui assurera désormais une aisance dans divers jadis prospères et aujourd'hui bien délaissé et qui, par conséquent, végètent.
On nous objectera peut-être que, puisqu'il y a des gens riches à la tête, ils pourraient bien faire édifier l'immeuble avec leurs propres ressources, le capital nécessaire n'étant que de 600.000 fr., somme relativement peu élevée. Ceux qui tiendraient ce raisonnement montreraient une étroitesse d'esprit indigne d'arcachonnais. Les premiers souscripteurs ont voulu au contraire que le commerce local put contribuer à la chose et nous ne doutons pas que leur idée généreuse soit comprise.
Nous avons un maire qui draina l'argent des contribuables à Moulleau : il faut réagir et se défendre, et opposer à ses procédés administratifs scandaleux une barrière qu'il n'arrivera jamais à briser.
D'ores et déjà on peut souscrire sans frais chez M. Emile Lecoq, banquier, qui fournira les éléments nécessaires.
Allons, arcachonnais, un moyen se présente de relever notre station, unissons-nous pour faire triompher l'œuvre généreuse de citoyens qui méritent notre reconnaissance, et qui sont, eux, les véritables amis d'Arcachon.


Jules FILLOU


Textes recueillis par Aimé Nouailha
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